Madagascar : ces chirurgiens français de Médecins du Monde qui opèrent des becs-de-lièvre

Depuis quinze ans, des équipes de chirurgiens français opèrent des becs-de-lièvre à Madagascar. Invisible désormais en Europe, cette maladie est encore très présente sur la Grande île en raison du coût souvent prohibitif de l’intervention.

A mesure qu’il s’éloigne de la route encombrée, le chemin se fait plus étroit : 1,50 mètre de terre humide, bordée de cases de béton nu prises en tenaille entre les rizières et la rivière Ikopa, qui traverse ­Antananarivo. Au loin s’étalent les collines de la capitale malgache. D’ici on distingue les couleurs chaudes des bâtiments, mais pas leur élégante architecture coloniale. Quand Esther a obtenu son bac – une première dans la famille –, c’est dans ce faubourg de « Tana », comme on surnomme la capitale de Madagascar, qu’elle a rejoint sa sœur. Pour s’inscrire à l’université, et « affronter la vie d’après ».

Le coût de l’opération est souvent prohibitif

« Après », pour Esther, ce sera après la maladie, après l’exclusion : un mot qui, dans la bouche de la jeune fille, résume vingt ans d’attente et de repli sur soi, faute de soins. Elle est née avec un bec-de-lièvre et connaît d’importants soucis d’élocution. Si cette malformation, qui se traduit par une jonction entre la bouche et le nez et par un trou dans le palais, est désormais presque invisible en Europe grâce à une prise en charge précoce des nourrissons, elle continue de marquer les visages dans les pays en développement car le coût d’une opération y est souvent prohibitif.

Assis dans la pièce unique de 8 mètres carrés où ils vivent à quatre, Esther et sa famille racontent la ­rudesse de l’existence. « C’est très dur de vivre dans un si petit espace, mais on s’en contente car on n’a pas l’argent pour plus », confie Jean-Lucien, le beau-frère. Comme 80% de la population malgache, ils subsistent avec moins de 1,80 euros par jour, sur son seul salaire de chauffeur. La santé est un luxe qu’ils ne peuvent pas se permettre.

Une faille que seule l’aide humanitaire est pour l’instant en ­mesure de combler à Madagascar. Ce dimanche de mars, Esther se rend au CHU de Tana – un lieu où de nombreux ­Malgaches n’osent même pas mettre les pieds. Elle est l’une des patients sélectionnés sur critères médicaux par l’ONG Médecins du monde (MDM) pour l’une de ses « Opération sourire » sur l’île Rouge. Une semaine marathon au cours de laquelle une équipe de chirurgiens, d’infirmières et d’anesthésistes français bénévoles opèrent une trentaine d’enfants et d’adolescents.

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Pour Médecins du Monde « tout est fait pour montrer aux migrants qu’ils ne sont pas les bienvenus » Crise des migrants

Le docteur Jean-François Corty, directeur des Opérations Internationales de Médecins du Monde, condamne la politique du gouvernement en matière d’accueil des migrants. Dans son livre, La France qui accueille*, qui sort le 18 janvier prochain, le Toulousain veut montrer que le pays reste solidaire et que des solutions pour l’accueil existent.

Emmanuel Macron se rend ce mardi à Calais pour y rencontrer notamment les associations d’aides aux migrants. En tant qu’association, quel est votre point de vue sur la politique menée par le gouvernement en matière d’immigration ?

C’est une politique très agressive qui est dans la continuité de celle menée par les gouvernements précédents, que ce soit de droite ou de gauche. Cette politique met en difficulté les migrants, les aidants, remet en question le principe de l’asile et utilise des méthodes qui ne respectent pas les droits fondamentaux.  Tout est fait pour créer des conditions de dissuasion, pour montrer aux migrants qu’ils ne sont pas les bienvenus. Sur les 100 000 demandes d’asile de 2017, seulement la moitié ont été reconnues comme valables. Actuellement, les autorités sont prêtes à utiliser la violence, à détruire les abris à Calais, à gazer les sacs de couchage, pour empêcher l’arrivée de nouveaux migrants.  Continuer la lecture

Migrants: Ivry va accueillir des femmes dans son nouveau centre

Quelques bâtiments en bois abritent des chambres avec lits et armoires flambants neufs: à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), le centre d’accueil pour femmes et familles migrantes inauguré lundi s’apprête à recevoir ses premiers hôtes, dans le sillage du centre pour hommes déjà ouvert à Paris.

Ce centre, réservé aux femmes seules ou avec enfants, enceintes, et aux couples avec ou sans enfants, ouvrira ses portes jeudi.

Il accueillera d’abord un groupe de 90 migrants, selon l’association gestionnaire Emmaüs Solidarités, avant d’atteindre progressivement sa pleine capacité à la mi-mars: 400 personnes. Environ 350 seront réorientées depuis le centre de « pré-accueil » qui fonctionne déjà dans le nord de Paris, et 50 places seront attribuées à des familles roms qui vivent dans la rue à Ivry-sur-Seine.

Ces femmes, couples et leurs enfants resteront entre trois et cinq mois dans cette structure. Le temps de formuler une demande d’asile et d’être transférés vers des Centres d’accueil de demandeurs d’asile (Cada) pour attendre la fin de leurs démarches.

« Ici, on offre un accueil digne », pour « des publics fragiles », s’est félicitée la maire de Paris Anne Hidalgo devant la presse, après un tour du site en compagnie des ministres de l’Intérieur et du Logement, Bruno Le Roux et Emmanuelle Cosse.

« Ce centre, nous en avons besoin (…), particulièrement aujourd’hui où nous entamons une vague de grand froid qui appelle à une mobilisation extrêmement forte des services de l’Etat », a souligné Mme Cosse.

« Toute personne sur notre territoire a le droit à la solidarité et à la mise à l’abri, quel que soit son statut, quelle que soit son histoire », a-t-elle ajouté.

– ‘Villages à taille humaine’ –

Sur place, les premiers bâtiments prennent forme au dessus des anciens bassins filtrants. Le centre doit à terme occuper 4.800 m2 et s’articuler en six « quartiers » conçus comme autant de « villages à taille humaine », explique le directeur général d’Emmaüs Solidarité, Bruno Morel. L’association a recruté 80 salariés pour assurer son fonctionnement, aussi assuré par des bénévoles.

« La force de ce projet, c’est d’avoir des logements modulables », détaille son adjointe Aurélie El Hassak-Marzorati. Les chambres, entre 12 et 40 m2, seront adaptées en fonction de chaque famille.

Chaque quartier regroupera environ 70 résidents autour d’une « yourte ». Une structure inspirée de l’habitat mongol, où les migrants pourront se restaurer et participer aux activités collectives – ateliers sur la parentalité, formation au droit des étrangers. Continuer la lecture

Alep-Est : « Ce n’est pas normal de tuer des civils et des soignants de manière délibérée »

Médecin et directeur des opérations internationales à Médecins du Monde, Jean-François Corty est revenu jeudi sur franceinfo sur les conditions difficiles des médecins d’Alep (Syrie).

Des médecins se sont rassemblés jeudi 8 décembre à Paris en soutien aux médecins syriens qui essaient de soigner les victimes civiles habitant notamment dans la partie est de la ville d’Alep. L’un d’eux, Jean-François Corty, médecin et directeur des opérations internationales à Médecins du Monde, a expliqué à franceinfo que cette mobilisation avait pour but de rappeler que « ce n’est pas normal de tuer des civils et des soignants de manière délibérée« .

« Depuis le début du conflit, les civils paient un lourd tribut dans cette guerre. Ce sont des centaines de milliers de blessés et de morts, des millions de réfugiés et de déplacés », relève le médecin qui dénonce « une destruction aussi quasi-systématique des hôpitaux et des centres de soins« . Continuer la lecture

Migrants : un accès aux soins « alarmant » en Europe

 

JEAN-BAPTISTE FRANÇOIS, La Croix  le 15/11/2016 à 12h25
Mis à jour le 15/11/2016 à 15h17
  • Médecins du monde et ses ONG partenaires ont analysé la situation sanitaire de plus de 30 000 patients reçus en consultation dans 12 pays en 2015. Les deux tiers d’entre eux n’ont pas accès à une couverture santé.

En 2015, le cap du million d’exilés échoués en Europe par la Méditerranée a été franchi. Aujourd’hui, ils n’ont plus à craindre la guerre et les persécutions, mais ils sont toujours exposés aux maladies, à en croire le dernier rapport du réseau international de Médecins du monde. Continuer la lecture

Soins médicaux pour les plus démunis : des besoins croissants

Médecins du Monde passe au crible les difficultés pour se soigner que rencontrent les ressortissants étrangers et les Français en situation d’exclusion.

 

Ils viennent d’Algérie, de Roumanie, du Maroc, du Cameroun mais aussi de France… Au total, plus de 23.000 personnes en situation d’extrême précarité de 164 nationalités différentes ont été reçues en visite médicale en 2015 dans l’un des 20 centres d’accueil, de soins et d’orientation (Caso) de Médecins du Monde. Dans son rapport annuel publié lundi, l’association dénonce un accès aux soins très difficile et alerte sur la récurrence des problèmes bucco-dentaires, le manque de couverture vaccinale ou encore de suivi gynécologique que connaissent ces populations.

Parmi les personnes accueillies en consultation, plus de 80% se sont vus diagnostiquer au moins un problème de santé, voire deux pour 18% d’entre elles. Les principaux maux étaient de type respiratoire (asthme, toux…), digestif (infections, ulcères…), ostéoarticulaire et dermatologique. Près de six patients sur dix ont même découvert qu’ils souffraient d’une maladie chronique, diabète ouinfection à VIH par exemple, nécessitant un suivi et/ou un traitement. Mais pour les malades en situation irrégulière (environ la moitié des personnes reçues), la prise en charge demeure un important problème.

«Les étrangers en situation régulière ont la même couverture sociale que tout le monde: laprotection universelle maladie (PUMa), précise le Dr Jeannine Rochefort, déléguée régionale Ile-de-France de Médecins du monde. Par contre, il est beaucoup plus délicat d’avoir accès aux soins pour les personnes en situation irrégulière. Celles-ci doivent justifier qu’elles sont sur le territoire depuis plus de trois mois, en donnant une adresse. C’est une démarche compliquée qu’il faut renouveler chaque année. Parfois, il arrive que des pièces complémentaires soient demandées, alors que celles-ci ne sont pas obligatoires!», déplore le Dr Rochefort. Selon le rapport, seuls 9% des étrangers en situation irrégulière disposaient d’une couverture maladie lors de leur première visite dans l’une des structures de Médecins du Monde.

Couverture vaccinale et caries

Le rapport pointe également l’état de santé bucco-dentaire très dégradé des personnes, en particulier pour les patients de plus de 40 ans. «Ils présentent en moyenne plus de 3 dents cariées et 4 dents absentes (…), bien plus que ce qu’on observe dans la population générale», précise Médecins du Monde. L’association se montre également très préoccupée par la couverture vaccinale de ces personnes. Parmi les plus de 15 ans, moins d’une personne sur deux est à jour pour le tétanos, la diphtérie, la polio et le BCG. Ces chiffres sont meilleurs pour les enfants de moins de 15 ans, même si la couverture vaccinale reste «insuffisante» selon l’association. Continuer la lecture