Hépatite C : polémique sur l’accès aux traitements

Des associations de patients dénoncent le rationnement de l’accès aux nouveaux traitements très coûteux pour la Sécurité sociale.

Pour la première fois en France, « les pouvoirs publics ont rationné l’accès aux soins », se sont récemment indignées plusieurs associations de patients (Ciss, Aides, Médecins du Monde…). Les nouveaux traitements de Gilead, BMS et Abbvie sont en effet réservés à des stades avancés de l’hépatite C, « alors que les études montrent qu’il est préférable d’initier un traitement précoce avant que le foie ne se dégrade », selon elles. Ce tri des malades constituerait « un dangereux précédent pour l’accès à toutes les nouvelles thérapies à venir, notamment dans le cancer ». Les associations appellent les pouvoirs publics à étendre les traitements innovants à tous les malades, en n’hésitant pas à fixer unilatéralement les tarifs. Elles « exigent » aussi des industriels « une baisse drastique des prix des traitements actuels et à venir ».

Rationnement des soins  ? Au ministère de la Santé, on estime au contraire que la politique française est très volontariste. « L’hépatite C va être éradiquée en France, c’est une certitude », a d’ailleurs déclaré Marisol Touraine aux « Echos » le 11 février. Depuis deux ans, les dépenses pour soigner cette maladie ont explosé, au point de contraindre le gouvernement à faire voter un mécanisme de récupération d’une partie du chiffre d’affaires des fabricants. Le coût du traitement de l’hépatite C s’est élevé à 1,15 milliard d’euros en 2014, ramené à 650 millions d’euros après diverses remises. En 2015, estime Gilead, l’addition aurait plafonné à 700 millions d’euros – soit le seuil de déclenchement du mécanisme législatif.

Michel Joly, qui dirige la filiale française du laboratoire américain, estime que l’objectif gouvernemental d’éradication de la maladie peut être atteint dès 2024  : « Il suffit d’ouvrir l’accès à tous les patients, y compris les moins sévères, et de traiter 15.000 à 20.000 malades par an », calcule-t-il. Selon les projections de Gilead qui capte encore les deux-tiers du marché, moins de 15.000 patients auraient été traités en 2015, après 11.600 en 2014. « Dès la fin de cette année, quasiment tous les patients à un stade avancé auront été traités », insiste Michel Joly, pour souligner que l’ouverture est inéluctable.

Ce que les industriels veulent éviter, c’est un coup de rabot sur leurs prix. Le gouvernement doit réunir en avril une conférence à Lyon sur le thème de l’innovation, pendant laquelle plusieurs pays européens envisageront une stratégie tarifaire commune face aux laboratoires. Surtout ne touchons à rien, plaide Michel Joly, car les prix ont déjà été divisés par deux en deux ans : les patients qui se présentent sont moins atteints qu’au début, et les nouveaux médicaments « deux en un » sont un peu plus économiques.

Les prix continueront à baisser d’eux-même, ajoute-t-il : « La Société française d’hépatologie vient de recommander des traitements en 8 semaines au lieu de 12, ce qui signifie que tous les médecins vont pouvoir prescrire des traitements un tiers moins cher. » Si le prix unitaire de la pilule demeure, mais qu’on accélère le rythme, c’est tout bénéfice pour les fabricants. Ils veulent écouler leur marchandise avant l’arrivée des nouveaux anticancéreux qui pourraient ébranler le financement du système de soins.
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