« Travailler pour les prostitués devient dangereux »

Prostitution La loi sur le racolage passif accroît la violence envers les prostituées chinoises

Elles disent qu’elles sont là pour « manger de l’amertume ». Et cela se voit sur leurs visages fatigués, qui se pressent dans le Lotus Bus de Médecins du monde ce soir. Il ne fait pas bien froid, pourtant elles sont emmitouflées dans de grandes écharpes, comme pour se cacher. Certaines prennent les sachets de préservatifs qu’on leur distribue sans un mot, mais la plupart échangent et plaisantent avec les bénévoles. Car ici, elles ont droit à la considération dont elles sont cruellement privées au quotidien.
Originaires du Nord de la Chine (1), la désindustrialisation de la région les a, pour beaucoup, laissées sans travail. Une catastrophe dans un pays où tout le système de sécurité sociale est lié à l’emploi. Seule porte de sortie, l’exil. Mais une fois en France, leur statut de migrantes non francophones leur offre peu de possibilités. La prostitution est souvent leur seul moyen de survie. Elisa, qui vit dans un dortoir de 17 m2 qu’elle partage avec quinze femmes, n’aurait jamais pensé « devoir faire cela, mais je n’ai pas d’autre choix ». Elégante, elle porte un serre-tête et un joli manteau noir. Mais à voix basse, elle raconte un quotidien de violences et d’angoisses.
Comme un millier de ses congénères (2), Elisa sillonne l’Est parisien dans un périmètre qui va de la porte de Clignancourt (18e) à la porte de Vincennes (12e), en passant par République et la gare du Nord (10e), à la recherche du client et de l’anonymat. Une façon de pratiquer leur activité qui leur a valu le nom de « marcheuses ». « Travailler comme je le fais dans la rue, c’est très dangereux, reconnaît Elisa. Je ne comprends pas pourquoi on ne nous autorise pas à nous regrouper dans un même lieu, ce serait plus sûr pour nous. » Elle ne comprend pas non plus l’attitude de la police, parfois agressive à l’égard de femmes que leur isolement soumet à tous les arbitraires.

« J’ai peur de tout »
Une attitude également dénoncée par une étude de Médecins du monde réalisée entre juin 2010 et octobre 2011 auprès de cinquante-six femmes. 22,8 % d’entre elles auraient été interpellées plus de cinq fois, voire plus de dix fois, pour « racolage passif » (lire ci-dessous). « Les policiers m’ont dit que je faisais des signes aux voitures, mais ce n’était pas vrai.

[SOURCE]

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