Médecins du Monde est contraint de suspendre temporairement ses activités sanitaires et nutritionnelles dans le Nord du Mali

Alors qu’une crise alimentaire se profile au Sahel, la dégradation sécuritaire au Mali risque de priver les populations d’une aide indispensable.

LES CONSTATS SUR PLACE

Les équipes de Médecins du Monde, actives au Mali dans les Régions de Kidal (Nord-Est), Gao (Est),Mopti (Centre) et Bamako (Centre-Ouest), constatent des déplacements de populations de certaines villes du Nord du pays où des affrontements violents ont eu lieu. MdM estime à plusieurs milliers ces mouvements de population vers les pays limitrophes dont la Mauritanie et l’Algérie.

Ce constat a pu être dressé à Niafunké et Leré dans la Région de Tombouctou, à Kidal, Adiel-Hoc et Tessalit, dans la Région de Kidal où des combats de haute intensité ont eu lieu ces 15 derniers jours, et à Menaka dans la Région de Gao. « Une partie de la population fuit les villes pour se réfugier dans les brousses sans eau, sans provisions et sans soins », nous explique un responsable de la mis sion de MdM-Belgique au Mali, « pour tous ceux qui ne sont pas déjà en Algérie ou en Mauritanie, on parle â œd’errance⠝ de puits en puits », continue-t-il.

DES CONSEQUENCES INQUIETANTES

Si dans certaines zones du Nord du pays, il est encore possible d’acheminer matériel, médicaments et intrants nutritionnels dans les centres de santé locaux, d’autres sites où vivent notamment certaines populations nomades sont, à l’heure actuelle, inaccessibles, mettant à mal l’accès aux soins de santé de ces populations. Les équipes mobiles de Médecins du Monde devaient permettre d’atteindre ces populations. Si, pour des raisons sécuritaires, l’accès aux populations devient de plus en plus compliqué dans la région de Gao, elle est critique dans la région de Kidal.

« Suite aux conflits dans la ville d’Adiel-Hoc, nous avons constaté un afflux massif des populations vers la zone d’Inamzil et Toulaft dans les environs immédiats d’Adiel-Hoc : nous comptons des dizaines de familles déplacées sans aucune assistance alimentaire et sanitaire », témoigne un médecin de MdM dans la Région de Kidal. « Après les combats, la ville d’Adiel-Hoc fût le théâtre de pillage : magasins, commerces, et centres de santé ont été pillés par des individus », rapporte-t-il. « L’intensité des combats dans la ville a entrainé une psychose des habitants et des travailleurs locaux. Cet te psychose est responsable du départ massif des populations nomades vers la brousse et l’Algérie et de celui d’une partie des personnels de santé vers le sud du pays en direction de Gao. » MdM enregistre le départ d’une partie du personnel médical des structures publiques de santé de la Région de Kidal, ce qui rend l’offre de soins totalement insuffisante.

MdM constate une réduction considérable des échanges commerciaux entre les régions de Kidal et Gao et la frontière algérienne, ce qui se traduit par une faible disponibilité alimentaire dans une zone déjà fragilisée par une insécurité chronique. Le conflit fragilise davantage le tissu socio-économique et sanitaire de la région dans un contexte de crise alimentaire annoncée.

Médecins du Monde s’inquiète de voir ainsi l’espace humanitaire se réduire au moment où le déficit alimentaire chronique du Sahel prend des proportions très inquiétantes et impose le développement d’activités de prévention et de traitement de la malnutrition ainsi que d’aide alimentaire au bénéfice de populations qui en ont plus que besoin.

LES ACTIONS DE MdM

MdM Belgique est présent au Mali depuis 2002 et travaille sur quatre zones d’intervention mettant en oeuvre cinq projets (soins de santé primaires à Kidal et à Youwarou, lutte contre le verre de Guinée à Kidal, urgence nutrition à Gao et enfance vulnérable à Bamako). L’intervention de MdM porte sur une population de 250.000 personnes dont 14.000 femmes enceintes et 50.000 enfants de moins de 5 ans. Dans le Nord, MdM-B travaille avec les populations nomades qui du fait de leur culture et de leur mobilité ont un accès difficile aux soins de santé. Depuis plusieurs années, les pluies sont irrégulières entrainant une diminution de la production agricole et la quantité de pâturages disponibles. La sécurité alimentaire de ces populations est donc compromise. Le Système d’Alerte Précoce malien annonce une crise alimentaire à partir de mars 2012. Les ressources principales de ces populations nomades étant leurs troupeaux, MdM-B travaille en collaboration avec AVSF (Agronomes et Vétérinaires Sans Frontières) qui est responsable des aspects santé animale et recapitalisation du cheptel (donation de cheptel aux populations les plus vulnérables). Dans le Nord, MdM organise des équipes mobiles pour délivrer des soins de santé primaires incluant souvent la prise en charge nutritionnelle, des soins préventifs comme la vaccination, les consultations prénatales, le suivi de la croissance des enfants mais également des soins curatifs.

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