Le sort des Roms, un débat occulté dans la campagne

Stigmatisés, fréquemment expulsés, les Roms ont vu leurs conditions de vie se dégrader ces dernières années en France, s’émeut dans un récent rapport le collectif Romeurope, qui presse les candidats à l’Elysée de s’engager à respecter les droits de ces citoyens européens.

La Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) a critiqué mercredi la politique gouvernementale à l’égard des Roms, déplorant les « discriminations dont souffrent ces personnes » et regrettant l’absence de « réelle stratégie » sur ce sujet.

« Nous constatons depuis plusieurs années une dégradation massive des conditions de vie des Roms vivant en France », estimés à quelque 20 000, renchérit le directeur général de Médecins du Monde, Jean-François Corty, dont l’association est membre du collectif Romeurope.
« Il existe une intention objective de leur nuire et de les dissuader de rester sur le territoire », explique le médecin, qui dénonce une « culture du bouc émissaire en période de crise », visant ces membres de la minorité la plus pauvre d’Europe, majoritairement originaires de Roumanie et de Bulgarie.

Fin juillet 2010, dans un discours musclé sur la sécurité prononcé à Grenoble, le président Nicolas Sarkozy avait demandé au ministère de l’Intérieur de « mettre un terme aux implantations sauvages de campements de Roms », fixant un objectif de 300 camps démantelés en trois mois.

En septembre 2011, le ministre de l’Intérieur Claude Guéant avait lancé une vaste offensive contre la « délinquance roumaine » et prôné un « retour au pays » de leurs auteurs, y compris les mineurs.

Défiance stigmatisante – Selon des chiffres fournis à l’AFP par le ministère de l’Intérieur, 9 300 Roumains et Bulgares ont été expulsés de France en 2009 puis 9 529 en 2010.
Enfin, mi-janvier, le gouvernement a reconnu avoir reconduit pour deux ans, jusqu’à fin 2013, les mesures transitoires restreignant l’accès à l’emploi en France des ressortissants roumains et bulgares, en invoquant « la conjoncture économique ».

« Le raisonnement du gouvernement témoigne d’une défiance stigmatisante envers les Roumains et Bulgares. Une peur injustifiée de l’invasion, de grandes migrations intra européennes que rien ne justifie », commente Malik Salemkour, vice-président de la Ligue des droits de l’Homme.
Or, « ces politiques à la fois discriminatoires et répressives autant qu’inefficaces ont des répercussions très néfastes sur les migrants roms », dénonce Romeurope, en opposant un cahier de revendications concernant droit au séjour, travail, logement et protection sociale.

« Les expulsions à répétition de leur lieu de vie sans proposition de relogement entraînent des ruptures de soins dangereuses ou encore des ruptures de scolarisation qui précarisent encore plus ces populations », déplore Jean-François Corty, de MdM.
« Les acteurs politiques et les candidats à la présidentielle ne mesurent pas l’urgence que ces personnes vivent ».

Camps – Mi-février, le candidat socialiste à l’Elysée François Hollande avait souhaité sur Canal+ des « règles européennes » pour éviter l’errance des populations roms « acceptées nulle part », en particulier en Roumanie, tout en estimant qu’il fallait aussi « des camps » pour éviter que les Roms migrants « s’installent n’importe où ».
« Au-delà de la maladresse » qu’avait constitué l’emploi par François Hollande du mot « camps », le Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap) avait aussitôt pressé le candidat du PS de préciser sa position sur les conditions d’accueil en France des Roms et sur les mesures transitoires les visant.
Sollicitée par l’AFP, l’équipe de campagne de M. Hollande n’a pas donné suite.

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