Des accords bilatéraux peuvent-ils dissuader les migrants de prendre la mer?

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AUTOUR DU MONDE – Angela Merkel était samedi en Turquie pour visiter un camp de réfugiés. La chancellière allemande souhaite mettre en place des mesures pour réguler, voire limiter, le flux de migrants vers l’Europe et son pays.

Angela Merkel a visité un camp de réfugiés en Turquie samedi, à quelques kilomètres de la frontière syrienne. Accompagnée du président du Conseil européen et du Premier ministre turc, la chancelière allemande espère faire taire les critiques sur l’accord signé le 18 mars entre Bruxelles et Ankara. D’importantes mesures de sécurité ont entouré cette visite, qui survient trois semaines après le retour en Turquie des premiers migrants de Grèce.

L’accord prévoit en effet le renvoi de tous les réfugiés arrivés illégalement sur les îles grecques. Pour chaque Syrien renvoyé, l’Union européenne accepte d’accueillir un compatriote déjà installé en Turquie, en contrepartie d’aides financières et de la suppression des visas pour les Turcs souhaitant venir en Europe. Depuis la signature de ce « marché », le nombre de réfugiés arrivés illégalement en Grèce par la mer a considérablement baissé. « Mais cet accord est sordide, il viole les droits fondamentaux et ne fera que déplacer le flux des migrants », estime le docteur Françoise Sivignon, présidente de Médecins du monde.

Barrer une route avec le risque d’en ouvrir une autre?

L’humanitaire revient du camp d’Idomeni, à la frontière gréco-­macédonienne, où plus de 10.000 réfugiés vivent dans des conditions d’insalubrité et de grande pauvreté, bloqués et empêchés de poursuivre la route terrestre des Balkans. Une route empruntée par la majorité du million de migrants arrivés en Europe en 2015. « Ceux qui fuient des pays en guerre ou en conflit comme la Syrie, l’Irak ou l’Afghanistan sont déterminés », prévient Françoise Sivignon, qui craint alors de les voir prendre massivement « la route de la Méditerranée centrale », celle qui relie la Libye ou l’Égypte à l’Italie.

Lire notre reportage : Dans le camp d’Idomeni, les migrants ont perdu la raison

Pour le moment, ce passage est essentiellement emprunté par des Africains, Nigérians, Gambiens et Somaliens en tête, selon le Haut-Commissariat aux réfugiés de l’ONU. Un passage particulièrement dangereux. Alors qu’il suffit de quelques heures pour relier la Turquie à la Grèce, le périple entre les côtes d’Afrique du Nord et l’Italie peut durer plusieurs jours. En 2015, d’ailleurs, selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), près de 700 personnes sont mortes en tentant de traverser la mer Égée en direction de la Grèce et 3.000 en Méditerranée pour rejoindre l’Italie. En visite à Rome vendredi, le vice-président du gouvernement d’union nationale libyen a demandé à l’UE de négocier un accord comme celui conclu avec Ankara. Pas question, a répondu le président du Conseil européen, qui estime qu’il ne peut servir de « modèle universel applicable aux autres voies d’immigration ».

Cette semaine, un naufrage aurait coûté la vie à près de 500 migrants dans le sud de la ­Méditerranée. L’amélioration des conditions de navigation avec l’arrivée des beaux jours fait craindre la multiplication des drames. Près de 800.000 personnes seraient en attente de partir sur les côtes libyennes.

Garance Le Caisne – Le Journal du Dimanche

 

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