Médecins du Monde au Canada

PIERRE SAINT-ARNAUD
La Presse Canadienne
Montréal

À défaut d’aller chercher des services médicaux, les itinérants et autres clientèles vulnérables verront ces services se déplacer jusqu’à eux.

L’organisme Médecins du Monde Canada mettra en service la semaine prochaine sa toute nouvelle clinique médicale mobile.

Il s’agit d’un véhicule muni de tout l’équipement pour des consultations médicales à bord duquel prendront place un médecin bénévole, une infirmière – ou un infirmier, selon le cas – et d’autres bénévoles, notamment des travailleurs sociaux.

«Ce sont des médecins qui nous donnent des heures de travail gratuitement, après leurs heures régulières», a tenu à souligner le directeur général de Médecins du Monde Canada, Roch Harvey.

Le véhicule sillonnera les rues de Montréal pour aller à la rencontre de personnes marginalisées.

«Avec la clinique mobile, on va se déplacer vers les lieux où on retrouve les besoins, dans les parcs, dans les ruelles», a expliqué M. Harvey.

L’intervention mobile offre le double avantage de donner un accès facile aux personnes vulnérables et de faciliter leur intégration au réseau de la santé.

«Ça s’adresse à des personnes qui sont dans la rue, qui vivent en itinérance, qui ne fréquentent pas les cliniques ou les CLSC parce qu’elles n’ont pas de carte d’assurance-maladie. Elles sont désorganisées, souvent ce sont des utilisateurs de drogue, certains ont des problèmes de santé mentale», a indiqué M. Harvey.

Cette clientèle se retrouve trop souvent marginalisée et pas nécessairement par choix, souligne-t-il.

«Ce sont des gens qui, pour différentes raisons, ne vont pas se faire soigner. Parfois, ils sont mal reçus quand ils vont dans les cliniques, ou ils n’ont pas de carte d’assurance-maladie, ils l’ont perdue. Nous, on apporte les soins à ces personnes», a-t-il dit.

Le projet est financé en partie par les pouvoirs publics, mais surtout par l’Oeuvre Léger et des donateurs privés.

Médecins du Monde a obtenu des succès considérables avec des projets similaires ailleurs, notamment en France et en Grèce.

L’insécurité alimentaire touche près de 80 % des précaires

À l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre la faim, le 15 juin, Médecins du Monde publie une enquête sur l’alimentation des personnes en grande précarité et ses conséquences sur la santé, réalisée à partir des données de 7 de ses centres d’accueil de soins et d’orientation (CASO) ; soit 346 personnes, à 63  % des hommes, en très grande majorité (97 %) des ressortissants étrangers.

L’insécurité alimentaire touche près de 80  % des foyers, surtout ceux qui vivent à la rue, dans un squat, ou en campement et plus de la moitié des personnes déclarent n’avoir pas toujours assez à manger. Plus des 3/4 des enfants de moins de 5 ans ont été allaités, en moyenne 7 mois, avec une diversification le plus tard possible.

Seulement 13 % des enfants de moins de 19 ans ont reçu 4 prises alimentaires dans les 24 heures précédant l’enquête et aucun n’a consommé les fruits et légumes recommandés par le plan national de nutrition santé. Chez les adultes, 71 % ont consommé au moins 3 féculents, 3  % seulement, au moins 3 produits laitiers et 0,3 % 5 fruits et légumes. Continuer la lecture

« A Calais, on traite les migrants comme des chiens

L’Humanité.
Jean-François Corty, directeur des missions France de Médecins du Monde revient de Calais où il a pu constater une situation sanitaire alarmante, aggravée par une traque policière sans relâche. Il dénonce l’inhumanité et l’incohérence de la politique migratoire française, notamment envers des personnes fuyant des pays en guerre.

De retour de Calais où des équipes de Médecin du Monde continuent, dans des conditions rendues très difficiles par la présence policière massive et celle de jeunes du groupuscule d’extrême droite « sauvons Calais », leur travail d’accompagnement auprès des migrants en cours d’expulsion, Jean François Corty, directeur des missions France de Médecins du Monde nous livre son analyse de la situation et nous dis sont indignation face à la politique de l’Etat français qui se disait prêt à bombarder Damas pour sauver les civils mais mobilise les CRS contre les réfugiés syriens à Calais.

Humanite.fr : Pouvez-vous nous faire un rapide état des lieux de la situation des migrants de Calais ?

Jean-François Corty : On assiste à une montée en pression dans le calaisis depuis ces 3  derniers mois à cause d’une recrudescence d’arrivée de migrants en provenance de Syrie, à cause de la guerre et d’Erythrée, à cause de la recrudescence des combats au sud Soudan où de nombreux Érythréens sont refugiés. Plus de 7 jeunes ont trouvé la mort depuis le début de l’année notamment en chutant des camions dans lesquels ils s’étaient introduits pour tenter de rejoindre l’Angleterre. La situation est tellement tendue à Calais que les migrants prennent des risques inconsidérés pour traverser la Manche.

Humanite.fr : On parle beaucoup de la galle qui toucherait plus d’une centaine de migrants, qu’en est-il ?

Jean-François Corty : Il y a effectivement  une épidémie de galle depuis trois semaines au sujet de laquelle Médecin du Monde a alerté les autorités afin qu’un traitement et une prise en charge soit apportée aux malade. Il y avait déjà eu une épidémie de galle à Calais en 2009, à la suite de quoi nous avions demandé de meilleures conditions sanitaires,  à savoir des latrines, des points d’eau, etc. Rien de cela n’a été fait. C’est donc logique que cela recommence ! La semaine dernière nous avons fermement condamné le fait que l’annonce d’une prise en charge des personnes atteintes de la galle ait été combinée avec une opération d’expulsion et de violence. Nous avons constaté d’emblée qu’il n’y avait pas d’objectif bienveillant concernant la prise en charge médicale et qu’il était clairement la destruction des campements sans alternatives de relogement. Or on sait que pour une prise en charge correcte et efficace des personnes atteinte de la galle, il faut un protocole complet associant l’administration de comprimés aux personnes atteintes et aussi à celles ayant été au contact de malades, la prise de douches et la fourniture de vêtements propres. Surtout il faut que les personnes traitées puissent se reposer pour que les médicaments puissent agir. Il faut également que l’on puisse faire un suivi quelques jours après…. Le fait d’annoncer la distribution de médicaments le même jour que l’expulsion, qui en en réalité a été pratiquée à quelques heures de décalage, voue à l’échec la prise en charge médicale puisque cela crée une défiance chez les migrants dont une grande partie cherche à fuir pour échapper à la police et du coup, ne prendra pas le traitement. Par manque d’explication, certains ont également refusé de prendre un médicament dont ils ne comprenaient pas à quoi il servait.

Humanite.fr : Est-ce que Médecin du Monde a tenté d’informer les migrants sur le protocole qui leur était proposé ?

Jean-François Corty : Nous n’avons pas souhaité nous associer à ces opérations annoncées par la préfecture car nous en dénonçons l’incohérence et la contradiction qui existe entre la santé publique et le principe sécuritaire. Nous ne voulions pas cautionner ce qui se fait actuellement !

Humanite.fr : Comment cela s’est passé concrètement ?

Jean-François Corty. Hier soir, on a vu débarquer quelques personnes de la permanence d’accès aux soins de santé (PASS) avec deux tables et quelques comprimés. Elles se sont installées au milieu de l’endroit de la distribution des repas… Quelques migrants ont pris le comprimé, mais pas la majorité. Très peu d’explication ont été données, donc, très logiquement les malades n’ont pas adhéré au traitement. Tout cela relève d’un total amateurisme ! Ce matin, on a vu débarquer des CRS en nombre conséquent… Il y avait aussi des bus, sensés amener les migrants vers des douches. Mais ils n’ont pas voulu monter dedans par peur d’être arrêtés, conduits en centre de rétention et expulsés. A l’heure actuelle la situation est très confuse, des négociations sont en cours pour tenter de trouver des solutions pour un éventuel relogement… Ce qui est dramatique c’est la présence sur place de jeunes du groupe extrémiste « Sauvons Calais » qui attisent la haine et les violences. Ils se positionnent face aux médias présents pour expliquer aux journalistes qu’il faut détruire ces campements… C’est très confus, cela pourrait vite mal tourner, et on tente d’être vigilant.

Humanite.fr : Que peut faire Médecin du Monde face à une telle situation ?

Jean-François Corty : Nous somme présents et en fonction de l’évolution des choses, on est prête à proposer des « solutions de survie ». Si les abris sont détruits, on va distribuer des tentes, des jerricans d’eau potable et des sacs de couchage pour les migrants là où ils seront, si on arrive à les trouver car ils risquent de fuir un peu dans tous les sens. Continuer la lecture

Prise en charge des personnes vulnérables : FHF et Médecins du Monde s’engagent

La FHF (Fédération hospitalière de France) et Médecins du Monde ont décidé d’unir leurs forces pour que les plus fragiles ne soient pas oubliés dans la stratégie nationale de santé ni dans la future loi de santé. Dans un rapport intitulé : « La prise en charge des personnes vulnérables : agir ensemble à l’hôpital et dans le système de santé », ils formulent 35 propositions se regroupant en neuf axes :

  • Renforcer la place des permanences d’accès aux soins de santé (Pass) dans les établissements de santé,
  • Développer et diversifier les dispositifs hospitaliers,
  • Soutenir les professionnels hospitaliers et s’engager résolument à leurs côtés,
  • Consolider la dimension territoriale de l’action des hôpitaux,
  • Réviser les modes de financement,
  • Garantir l’accès aux droits à l’assurance et à la complémentaire maladie,
  • Réaffirmer le rôle d’acteur des usagers,
  • Lancer des programmes de formation des professionnels à la thématique « vulnérabilité et santé »,
  • Promouvoir l’enseignement et la recherche universitaire autour des problématiques de la vulnérabilité.

Ces propositions doivent « permettre de lutter contre le non respect des droits, de développer des filières d’accès aux soins adaptées à la situation sociale des personnes ou encore de dépasser les barrières culturelles et financières qui se dressent entre les personnes vulnérables et les lieux de soins et de prévention », indiquent les associations dans un communiqué commun.

…En savoir plus…

Consulter le Rapport FHF et Médecins du Monde

Médecins du monde appelle à un accès aux soins pour tous en Europe

Dans la perspective des élections européennes 2014, Médecins du monde (MDM) a publié ce mardi un rapport sur l’accès aux soins des plus précaires en Europe. L’association demande aux gouvernements nationaux et aux institutions européennes de garantir des systèmes de santé nationaux universels, solidaires et équitables, ouverts à toute personne vivant dans l’Union européenne.

« La crise économique et les mesures d’austérité prises par les gouvernements ont des effets néfastes sur la santé des populations », notamment les plus pauvres, les femmes et les enfants. L’ONG insiste en particulier sur la nécessité d’un « accès inconditionnel au suivi prénatal des femmes enceintes et aux vaccinations essentielles des enfants qui aujourd’hui ne sont pas toujours assurés ».

Plus de 16 000 patients dans 8 pays d’Europe

Le rapport s’appuie sur les données recueillies en 2013 au cours de 29 400 consultations menées dans ses centres d’accès aux soins destinés aux plus précaires, dans 25 villes de 8 pays européens (Allemagne, Belgique, Espagne, France, Grèce, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suisse). Au cours de la période, 16 881 patients ont été accueillis.

Parmi les 285 femmes enceintes reçues, deux tiers (65,9 %) n’avaient pas eu accès aux soins prénataux avant de consulter et 42,8 % avaient été suivies trop tardivement. « Plus de 70 % d’entre elles nécessitaient des soins urgents ou assez urgents », souligne MDM.

Concernant les enfants, l’association déplore surtout l’insuffisance de la couverture vaccinale. Parmi les 1 703 ayant consulté l’un des centres MDM en 2013, « seul un mineur sur deux, au mieux, est vacciné contre le tétanos, l’hépatite B, la rougeole ou la coqueluche. Dans certains pays, ce taux est inférieur à 30 %, ce qui est bien en deçà des taux de couverture vaccinale de la population générale, qui se situent autour de 90 % », note l’association.

L’état des patients est « inquiétant » juge MDM et la situation est encore plus dure lorsque les patients sont sans autorisation de séjour européens ou extra-européens. L’association cite l’exemple de l’Espagne où « les immigrés adultes sans papiers ont été exclus des soins depuis le Décret-loi royal 16/2012, entré en vigueur en septembre 2012 ». D’une manière générale, le rapport constate que« les groupes déjà fragilisés avant la crise – ressortissants européens démunis, migrants sans papiers, demandeurs d’asile, usagers de drogues, travailleur(se)s du sexe et sans-abri – connaissent une réduction, voire une privation des éléments de sécurité et des réseaux qui leur assuraient une assistance de base ».

Évolution positive en France

Seules 2 % des personnes qui ont consulté citent la santé personnelle comme motif de migration, ce qui réfute « l’idée reçue que les mécanismes de protection
sociale représentent un facteur d’attraction pour les migrants »
, souligne l’association. Continuer la lecture

Médecins du Monde en action

Du centre hospitalier universitaire de Reims aux Philippines. Le docteur Patrick David, anesthésiste, sait ce qu’urgence et catastrophe veulent dire. Membre du conseil d’administration de Médecins du Monde, il ne partira « pas tout de suite » à Manille mais suit avec attention la situation.

L’association humanitaire est présente de longue date dans la capitale, via un programme Santé et environnement, pour suivre les habitants recyclant des déchets. « Une douzaine de personnes est en permanence à Manille, ce qui facilite nos interventions, toujours effectuées en lien avec des médecins locaux », détaille le praticien rémois.

Un logisticien expérimenté devrait avoir rejoint la zone de Tacloban aujourd’hui, là où le typhon a tout dévasté. Son rôle : évaluer les besoins et trouver « ce qui aura une vraie utilité ».

Les premiers besoins, dictés aussi des leçons du tsunami de 2004, iront plutôt à des cliniques mobiles.

« Notre but est d’aller au plus près des gens, alors que tout le réseau de soins est déstructuré », analyse encore M. David.

« Ne pas verser

dans la démesure »

Les premières réponses peuvent relever de la chirurgie, puis de la lutte contre les épidémies. Avant de réfléchir à la pérennité des actions.

Médecins du Monde finance sur ses fonds propres (25 000 €) cette nouvelle mission. Les humanitaires entendent « monter en puissance » et constituer des équipes progressivement. Avec pour objectif de « ne pas verser dans la démesure », comme il y a sept ans, quand les dons avaient afflué. Patrick David estime cependant à 50 000 ou 100 000 le nombre des blessés.

Un appel à la générosité est lancé sur le site www.medecinsdumonde.org.